Un myélome hépat-ant ! - 19/12/20
Résumé |
Introduction |
Le myélome est une prolifération clonale plasmocytaire maligne médullaire, fréquemment précédée d’une gammapathie monoclonale sanguine. Le diagnostic est parfois difficile du fait de symptômes généraux (asthénie, perte de poids, amaigrissement) avec douleurs osseuses, signes d’anémie ou d’insuffisance rénale. La présentation initiale extramédullaire est rare notamment celle hépatique, rapportée dans quelques cas de la littérature. Nous en présentons ici un exemple, avec une patiente dont l’hypothèse diagnostique initiale était une artérite à cellules géantes devant les céphalées - ou autre maladie inflammatoire ou oncologique étant donné l’altération de l’état général.
Observation |
Une patiente de 76 ans avec antécédent d’ostéoporose est hospitalisée dans le service de médecine interne pour AEG, céphalées, signe du peigne et apparition progressive de douleurs de la mâchoire sans événement ophtalmologique rapporté.
L’examen clinique initial retrouve seulement une diminution du pouls temporal gauche sans induration. La biologie ne retrouve pas d’inflammation sanguine mais l’électrophorèse protidique sérique démasque une hypergammaglobulinémie avec un profil monoclonal à 24,7g/L associé à une élévation des chaînes légères Kappa à 32mg/L (kappa/lambda=3,71), excrétées dans les urines également. La biopsie de l’artère temporale ne retrouve pas d’argument pour une artérite. Le scanner du corps entier à la recherche d’un foyer tumoral montre de multiples lésions osseuses hétérogènes ostéolytiques au niveau de la voûte crânienne ainsi que sur le rachis thoracolombaire, la clavicule et le bassin, fortement évocatrices de lésions myélomateuses. Des nodules hépatiques d’allure secondaires sont également vus ; il n’y a pas d’image d’artérite, tout comme au niveau des troncs supra-carotidiens d’après l’échographie Doppler.
Le myélogramme est donc réalisé : pas d’argument pour un myélome. La cytométrie de flux sanguine montre 1 % de plasmocytes. Une BOM confirme finalement le diagnostic de myélome multiple à chaîne légère Kappa. S’y associe une anémie inflammatoire modérée sans atteinte rénale ni hypercalcémie (myélome stade IIA).
La FOGD, la coloscopie et le bilan hépatique biologique explorant les nodules du foie sont normaux, les marqueurs biologiques tumoraux ainsi que l’examen clinique général et gynécologique sont sans argument pour une tumeur locale. Une biopsie hépatique est finalement réalisée et l’anatomie pathologique retrouve une localisation extramédullaire du myélome avec dépôt de chaînes légères Kappa, sans dépôt amyloïde.
Un traitement par velcade, cyclophosphamide, dexaméthasone (VCD) est donc débuté de manière bi-hebdomadaire, permettant une amélioration de l’état général de la patiente.
Discussion |
On note les signes non spécifiques présentés initialement par cette malade, pouvant évoquer une artérite à cellules géantes : le diagnostic était douteux étant donné l’absence d’inflammation biologique. Les céphalées et le signe du peigne se sont expliqués par la présence de lésions osseuses crâniennes, par l’hyperviscosité et/ou l’effet microvasculaire du myélome. La réalisation d’une électrophorèse des protides sanguines avec immunofixation a permis de dévoiler une hypergammaglobulinémie avec pic monoclonal, suggérant un myélome : cet examen, complété par le dosage des chaînes légères sanguines est peu cher et fortement informatif sur la qualification et quantification protidique sanguine.
L’atteinte extramédullaire initiale est rare, selon les séries de 1 à 7 %, touchant les différents tissus. L’atteinte nodulaire hépatique asymptomatique est d’autant plus originale : quelques cas retrouvent une atteinte du foie mais s’accompagnent généralement de douleurs abdominales, diarrhées ou perturbations hépatiques biologiques. La caractérisation de la lésion par scannographie ou IRM est essentielle, l’imagerie cartographiera la présence de tous les plasmocytomes. Une biopsie avec marqueurs en immunofluorescence permettra un diagnostic certain comme chez cette patiente.
Conclusion |
Le myélome peut parfois mimer une artérite par ses symptômes aspécifiques ; l’absence de syndrome inflammatoire entre autre met en doute le diagnostic. L’électrophorèse des protides sanguine avec immunofixation permet de s’orienter vers un autre diagnostic. Par ailleurs, il faut se méfier des cas de localisations extramédullaires du myélome notamment hépatiques, pouvant être asymptomatiques, révélées par l’imagerie : le myélome peut alors être confirmé par l’histologie.
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Vol 41 - N° S
P. A129 - décembre 2020 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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